Petite plongée dans le syndrome de l’imposteur – Partie 2

Dans un précédent billet, nous avons présenté le syndrome de l’imposteur puis le concept d’auto-efficacité, défini par le psychologue américain Albert Bandura, qui peut nous permettre de surmonter ce syndrome.

Albert Bandura propose quatre éléments pour développer notre auto-efficacité – ce qui peut donc nous permettre de surmonter le syndrome de l’imposteur.

1. Prendre conscience de ses processus de travail

Il s’agit de prendre conscience du processus ou de la stratégie que vous utilisez pour accomplir une tâche donnée et qui donne toujours d’excellents résultats. Par exemple, vous savez greffer un arbre, votre canard à  l’orange est réputé ou vous réparez les vélos comme s’ils vous obéissaient. Et à chaque fois, le résultat est excellent. Cela vous semble banal, mais des tas de gens sont incapables d’arriver aux résultats que vous obtenez.

Considérez ce processus ou cette stratégie comme distinct de vous. Prenez-en conscience. Quand vous faites cette tâche, vous sentez que vous maîtrisez votre affaire. Et qu’est-ce que la maîtrise ? C’est l’exacte opposée de la chance. Lorsque vous prenez conscience que vous suivez un processus et que ce processus produit de bons résultats de façon constante, la déprimante pensée magique du syndrome de l’imposteur s’estompe.

Vous avez sans doute remarqué que des gens qui sont très sûrs de leurs capacités peuvent souvent vous expliquer comment ils font. Ils sont conscients de leur processus. Prenez du recul et remarquez ce que vous faites qui donne de bons résultats. Comme l’a dit Carl Jung : « Tant que vous ne rendrez pas l’inconscient conscient, il dirigera votre vie et vous l’appellerez le destin. »

2. Vivre l’expérience par procuration
Il est naturel d’observer des personnes qui font des choses similaires à ce que vous faites. Certaines réussissent et d’autres échouent, ou font un travail médiocre. Vous vous rendez compte que votre processus fonctionne, et qu’il existe d’autres manières de faire de moins bonne qualité que vous choisissez de ne pas utiliser. Cela signifie que vous contrôlez votre affaire. Le contrôle signifie que ce n’est pas une affaire de chance.

Le problème, c’est que les personnes atteintes du syndrome de l’imposteur observent généralement les mauvaises personnes. Elles se comparent souvent à des personnes qui sont incompétentes. D’un côté, cela les rassure. Mais de l’autre, cela ne les convainc pas de leur propre talent. Ou bien parfois les personnes atteintes du syndrome de l’imposteur se comparent au 1% supérieur, ce qui est rapidement déprimant.
Pensez plutôt à Boucle d’or : ne cherchez pas à vous comparer à « trop froid » ou à « trop chaud », comparez-vous à « juste ce qu’il faut ». Selon Albert Bandura, vous obtiendrez les meilleurs résultats en observant des personnes qui sont vos pairs ou légèrement meilleures que vous.

Comment cela peut-il aider à résoudre votre problème de syndrome de l’imposteur ? C’est simple. Ils ont un système. Il fonctionne. Vous avez un système (si vous prenez le temps de le remarquer) et il fonctionne. Vous obtenez tous les deux de bons résultats, même si c’est de manière différente. Vous êtes des pairs. Ce n’est pas de la chance, c’est juste du talent.

Vous n’êtes d’ailleurs pas obligé de vous comparer à d’autres : vous pouvez vous comparer à votre « moi » idéal, en le prenant comme modèle. C’est ce qu’on appelle « l’auto-modélisation ». Regardez-vous travailler avec succès. Regardez le bon travail que vous avez fait. Les courriels intelligents que vous avez envoyés. Les présentations ou les rapports que vous avez réalisés, qui sont excellents. Tout ce qui vous fait dire : « Hé, c’est un travail super – et, oh, c’est moi qui l’ai fait. »

Selon Albert Bandura, l’auto-modélisation a un champ d’action remarquablement large et réussit souvent avec des douteurs-de-soi invétérés, Apparemment, il est difficile de faire mieux que l’observation de la réussite personnelle pour s’auto-persuader de ses capacités.

3. Rechercher la confirmation sociale
Pour les personnes atteintes du syndrome de l’imposteur, le simple fait de constater des résultats de qualité ne suffit pas à renforcer la croyance en leurs capacités. Il faut y rajouter quelque chose : la validation par des personnes extérieures.

Dites à vos amis que vous traversez une période difficile et que vous pourriez avoir besoin de leur soutien. Voici trois conseils issus de la recherche qu’il vous faut garder à l’esprit :

  • Si les commentaires positifs ne sont pas sincères, vous vous en apercevrez grâce à votre lentille négative et sceptique du syndrome de l’imposteur. L’éloge doit être légitime.
  • Il est préférable d’avoir des commentaires d’experts. Des éloges venant de quelqu’un qui ne connaît rien au domaine concerné sont facilement rejetés.
  • Les commentaires positifs sur votre travail sont agréables à entendre, mais les éloges sur vos capacités sont préférables. Si l’on vous félicite de travailler dur, il est facile d’en conclure que vous n’avez pas de talent.

4. Recadrer les états émotionnels et physiologiques

Nos sentiments et nos humeurs nous influencent, même si nous ne nous en rendons pas compte. Mais qu’est-ce qui déclenche ce sentiment ou cette humeur ? Quelle est la cause de notre « météo intérieure ? Ne pas dormir suffisamment, avoir faim ou avoir passé une mauvaise journée peut exacerber les sentiments des imposteurs, s’ils ne prennent pas conscience que ce sont là les causes sous-jacentes à leur sentiment ou à leur humeur.  Et une humeur dépressive active une vision globale de soi comme étant sans valeur. Autrement dit, il est plus facile de se considérer comme un imposteur quand on est de mauvaise humeur, ou d’une humeur négative.

Le problème, c’est que nous sommes absolument incapables de comprendre les véritables causes de nos sentiments et de nos humeurs. Vous pensez savoir pourquoi vous ressentez quelque chose, mais ce n’est qu’une interprétation approximative et souvent trompeuse des faits. Vous pensez que vous êtes grincheux à cause de ce que votre conjoint vous a dit, mais c’est en fait parce que vous n’avez eu que cinq heures de sommeil au cours des trois dernières nuits.

Mais voici le bon côté des choses : nous pouvons utiliser à notre avantage ce flou émotionnel. La cause et la signification des sentiments étant une question d’interprétation, nous pouvons choisir de les interpréter différemment. Nous pouvons les recadrer en quelque chose de passager ou d’indépendant de la tâche à accomplir, et ainsi notre compétence personnelle ne s’effondrera pas.

Par exemple, vous êtes agité avant cette réunion importante. Mais ce sentiment physique doit être interprété. Ce n’est pas parce que vous êtes un imposteur. Il peut s’agir d’excitation ou d’anticipation avant de vivre un grand moment.

Donc en recadrant les sentiments, on peut recadrer le syndrome de l’imposteur… et cela peut recadrer votre vie.

En résumé, voici comment on peut surmonter le syndrome de l’imposteur :

  • Prendre conscience de ses processus de travail : reconnaissez les systèmes que vous utilisez.
  • Vivre l’expérience par procuration : s’ils peuvent le faire, vous pouvez le faire.
  • Rechercher la confirmation sociale : quand Yoda vous dit que la force est avec vous, vous pouvez le croire.
  • Recadrer les états émotionnels et physiologiques : votre mauvaise humeur ne vient pas du fait que vous êtes un imposteur, mais (peut-être) parce qu’il pleut depuis trois jours.

Un dernier point : vous craignez peut-être que même en développant une auto-efficacité, vous retombiez prochainement dans des sentiments d’imposture. Ne vous inquiétez pas. En mettant en pratique les quatre principes ci-dessus, l’auto-efficacité peut devenir aussi obstinément ancrée dans votre cerveau que le sentiment d’être un imposteur.

Bruno Hourst

Ressources

 The Secret Thoughts of Successful Women: Why Capable People Suffer from the Impostor Syndrome and How to Thrive in Spite of It

Auto-efficacité : Le sentiment d’efficacité personnelle

This Is How To Overcome Impostor Syndrome: 4 Secrets From Research